Challenge AZ – les disparus de Signeulx : L comme Maurice Henri Julien Lefrancq

L’armée en héritage – Maurice Henri Julien Lefrancq

« Tu seras scieur de long ou bucheron, mon fils, comme ton père, tes oncles et ton grand-père ». Cela aurait pu être le destin de Maurice Henri Julien Lefrancq, issu d’une famille de scieurs de long du Nord.

Son père en décida autrement, en brisant la tradition familiale et en s’engageant dans l’armée. Grégoire Joseph Lefrancq, né en 1857 à Dourlers, dans le Nord, est militaire, adjudant sous-officier en garnison à Melun, Seine-et-Marne, lorsqu’il épouse, à Gommegnies, Nord, Marie Alphonsine Guerot. Sa femme décède alors qu’il est en garnison à Blois, adjudant au 31e de ligne, le 2 mars 1885. Il se remarie à Blois, le 28 mai 1885, avec Natalie Lefevre, alors qu’il est en garnison à Paris, caserne de la Pépinière.

C’est là que nait sa fille aînée, Germaine Suzanne, dans le 10e arrondissement, le 11 septembre 1888. La famille bouge au rythme des changements de caserne du 31e régiment de ligne.

Son deuxième enfant, Maurice Henri Julien naît à Blois, le 10 août 1890, alors que le 31e régiment de ligne y est en garnison.

Madeleine Reine France naît dans le 17e arrondissement de Paris, le 9 mars 1892, mais décède, dans le 8e arrondissement, le 21 juin de la même année, avenue Portalis, à la caserne de la Pépinière.

Après quinze ans neuf mois et dix-neuf jours de service, Grégoire Joseph, médaillé militaire, est admis à recevoir une pension militaire à compter du 1er septembre 1894. La famille vit alors à Levallois-Perret, Hauts-de-Seine et il est employé aux postes et télégraphes. Il n’en profitera pas longtemps, Grégoire Joseph décède le 4 janvier 1895.

Natalie, sa veuve, âgée de seulement vingt-huit ans, retourne à Blois avec ses deux enfants, âgés de sept et cinq ans.

Son beau-frère, Julien Joseph Lefrancq, a suivi les traces de son frère et s’est engagé dans l’armée. Il est adjudant, lui aussi, au 31e régiment d’infanterie. Il est en garnison à la caserne des Tourelles à Paris, depuis moins de six mois, étant auparavant en caserne à Melun, lorsqu’il épouse, le 27 septembre 1897, à Blois, Elise Augustine Lefevre, la petite-cousine de Natalie.

L’armée semble tracer la route des Lefrancq et de fait, Maurice Henri Julien, orphelin de père, devient enfant de troupe.

Comme son père a lié son destin au 31e, Maurice va lier le sien au 113e régiment d’infanterie. Il s’y engage pour cinq ans, le 12 août 1908, à l’âge de dix-huit ans. Il passe très vite caporal, le 25 février 1909, puis sergent, le 3 novembre. Son engagement terminé, il se réengage pour un an, le 2 mai 1913, puis encore pour un an, le 15 juillet 1914.

Ce sera son dernier engagement. Le 3 août 1914, il part avec son régiment, avec la 9e compagnie, sous les ordres du capitaine Vallin, vers la Belgique.

Pendant qu’il suit les traces de son père à l’armée, sa mère et sa sœur, Germaine Suzanne, vivent à Blois. Le 10 octobre 1906, Germaine épouse Henri Léon Gigoux, sergent tambour major, sergent major au 113e régiment d’infanterie. Il est en garnison à Blois. Son oncle, Julien Joseph, retraité à son tour de l’armée, adjudant décoré de la médaille militaire, est son témoin. Henri Léon aussi s’engage et se réengage jusqu’à la déclaration de guerre, avec le grade d’adjudant tambour major.

Et les deux beaux-frères partent pour le front, l’un célibataire, l’autre marié.

Au soir au 22 août 1914, Maurice Julien Lefrancq, sergent à la 9e compagnie du 113e régiment d’infanterie, est porté disparu.

Il est porté disparu, parce que son corps n’a pas été retrouvé. Mais sa mort est certaine. Deux témoins, Joseph Patrie, soldat de 2e classe, et Maurice Thuau, caporal, l’ont vu être très grièvement blessé.

Trois autres témoins, prisonniers de guerre, vont l’attester également auprès de la mission catholique suisse en faveur des prisonniers de guerre de Fribourg.

Henri Perrin, du 113e régiment d’infanterie, 10e compagnie, soldat infirmier au lazarett de Lippspringe, domicilié 110 rue de la Chapelle à Paris 18e, déclare que Maurice est tombé au champ d’honneur, le 22 août 1914, à Signeulx.

Octave Fleury, caporal au 113e, prisonnier de guerre, signale que le sergent Lefrancq a été blessé le 22 août 1914, dans la matinée, probablement par une balle, et que son corps n’a pu être évacué sur l’arrière.

Robert Roy, du 113e, prisonnier de guerre, indique que Maurice a été tué à Signeulx, le 22 août 1914 et qu’il en a informé la famille.

Cette information a été faite officiellement, le 14 janvier 1916, à la famille, par l’armée, mais la mère et la sœur de Grégoire le savaient déjà. Robert Roy leur avait annoncé la nouvelle, depuis son camp de prisonniers.

Son corps a finalement été retrouvé. Il repose à Houdlemont, à la frontière belge. Enfin, reposait, car il ne figure pas sur le monument aux morts de la nécropole d’Houdlemont. Mais il est sur celui de Blois.

Monument aux morts

Son beau-frère aura plus de chance. Il va survivre à la guerre, croix de guerre, étoile de bronze, mais n’en profitera pas longtemps. Il décède le 19 janvier 1925, à Coblence.

Christine LESCENE
Christine LESCENE

Généalogiste professionnelle depuis 1993 - formatrice en généalogie professionnelle depuis 1995 - Généa bloggeuse depuis 2008

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