La famille est une chose infiniment précieuse. Mais il est un adage qui résonne vrai dans beaucoup d’entre elles : on ne choisit pas sa famille.
Le fait de naître d’un même père et d’une même mère, n’est pas la garantie d’une fratrie homogène et aimante, sans nuage ni désaccord.
Les bagarres sont nombreuses, peut-être plus entre les garçons (et encore !!). Disons qu’avec les garçons, les paroles finissent souvent en pugilat physique. Mais c’est la règle non écrite d’une fratrie bien constituée.
Il en est de même des couples non ? Ceux qui ne se disputent jamais semblent “extra-terrestres”. Certains disant même qu’une bonne dispute permet d’évacuer la pression pour mieux avancer.
Des adages, des règles, des petites phrases toutes faîtes, il en existe beaucoup sur la famille, les fratries. Et elles sont souvent vraies, comme la sagesse populaire.
Jean Cousin et Marguerite Dupuy sont mariés depuis 1817. Ils sont créé une belle famille de sept enfants, cinq garçons et deux filles, au cours de leur vie de couple.
Mariés à Suèvres, ils ont vécu à Muides, Cellettes, Chemery, Mehers et Feings, où sont nés leurs enfants.
En 1860, Jean et sa femme sont fermiers à Chemery. Ils vivent et travaillent à la ferme, avec deux de leurs fils, le second, Louis Charles, quarante ans, et Eugène, trente ans, l’avant-dernier fils, et six domestiques. Les deux frères sont célibataires.
Le 15 octobre, à six heures du matin, il est temps de prendre soin des chevaux, avant de partir dans les champs. Eugène est un peu en retard, alors Louis Charles, pour l’avancer, commence à brider les chevaux de son frère. Ce dernier enfin arrivé en prend ombrage.
Louis Charles lui laisse la place, mais Eugène est contrarié et bouscule son frère aîné de deux bourrades. Louis Charles ne réplique pas et sort de l’écurie. Mais Eugène est d’humeur querelleuse.
L’absence de réaction de son frère le pique encore plus et il sort à son tour de l’écurie pour frapper Louis Charles, qui répond enfin et c’est une violente bagarre qui démarre entre les deux frères.
Des coups de pieds et des coups de poings sont échangés jusqu’à ce que leur mère, inquiète de cette violence, demande à un domestique de les séparer.
Une demi-heure plus tard, le domestique quitte le domaine pour labourer des champs, et les deux frères partent, chacun de leur côté, pour semer ailleurs. Tout semble rentré dans l’ordre.
Mais Eugène souffre d’un coup de pied qu’il a reçu au ventre et doit abandonner sa voiture pour se reposer sur le bord de la route. C’est là que le domestique, Huguet, le trouve. Il s’inquiète de son état et l’aide à remonter sur la voiture. Il le ramène à la ferme où il doit le mettre au lit, Eugène souffrant trop pour faire le moindre geste.
A partir de là, son état empire, malgré les soins du médecin appelé auprès de lui, et il décède, le lendemain, à six heures du soir.
Eugène est décédé d’une péritonite traumatique, provoquée par un coup de pied reçu sur une hernie dont il était atteint.
Il n’y a aucun doute, Louis Charles, en lui assenant ce coup de pied, a tué son frère. Il ne nie pas les faits et est arrêté et conduit à la maison d’arrêt, dans l’attente de son procès, Louis Charles est fratricide.
Le 9 novembre suivant, Louis Charles comparaît devant la cours d’Assise de Blois.
Il est très affligé, pleure sans cesse, et sa voix est tellement faible, lorsqu’on l’interroge, qu’il est difficile d’entendre ses réponses. Mais s’il reconnaît avoir porté le coup fatal, il nie toute intention de nuire à son frère. Il n’a fait que se défendre pour repousser l’agression de ce dernier. Et les témoins sont là pour corroborer ses propos. Cinq témoins attestent qu’effectivement, c’est Eugène qui a provoqué la bagarre et qui a donné les premiers coups.
Le jury délibère rapidement et conclut à un verdict de “non coupable”.
Louis Charles est libre, mais il devra vivre avec le fait qu’il a tué son frère.