Les bourreaux de Blois : arrivée des Ferey

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Joseph est mort. Ses fils sont trop jeunes pour prendre sa suite. De toute manière, les exécuteurs sont dorénavant nommés par le département, mais, quelque part, l’hérédité de la charge perdure. Est-ce pour cette raison que, le 11 Brumaire 9, soit trois mois après la mort de ses parents, Marie Sophie, dix-huit ans, épouse Charles Louis Ferey, trente-deux ans.

Il est de la dynastie des Ferey de Normandie. Son père, François Thomas Ferey, est exécuteur à Rouen, comme son père avant lui.

Sa mère, Anne Elisabeth Desmorest, est la sœur de la première femme de Joseph Doublot, Marie Anne Elisabeth, et donc descendante de Blaise Robert.

Cette fois encore, la dynastie de Blaise Robert continue, par les femmes et encore par les Elisabeth.

Charles Louis succède à son beau-père, et reçoit officiellement les instruments de son office, le 1er thermidor an X.

Il reçoit les échafauds, instruments de mort, poteaux, bois et autres objets nécessaires aux exécutions.

Il recevra

  • cinquante francs à chaque exécution pour conduire l’échafaud et l’instrument de mort au lieu de l’exécution, les monter et les démonter,
  • six francs pour les frais de voiture des condamnés à mort au lieu de l’exécution et au lieu de la sépulture,
  • vingt francs à chaque exécution pour conduire, monter et démonter l’échafaud d’exposition avec un ou plusieurs poteaux,
  • la somme de six francs à chaque exécution de jugement de contumax pour transport, fourniture et plantation de poteaux,
  • trente francs par an pour tous frais de fourniture pour les exécutions, tels que cordes, sangles, cartons, savons, chemises rouge, et
  • cinquante francs aussi par an pour fournitures, entretien et existence continuelle en bon et dû état des échafaud, instruments de mort, poteaux et tout autre ustensile nécessaire aux exécutions.

C’est grâce à ces notes de frais, que l’on découvre que, dès la première année de Charles Louis comme exécuteur, il va exposer, sur la place des exécutions, le nommé Louis Legoux, il va afficher le jugement de Louis Crepet, il va guillotiner Marie Magdeleine David, Pierre Clouzier et son fils Pierre Alexandre, exposer Silvain Hainaut et exposer Pierre Claude Debeine, pour un coût total de 226.28 francs.

Mais pour quels crimes ses personnes ont-elles été punies ?

Louis Legoux a été condamné à quatre ans de fer pour vol domestique. Il a été également puni de six heures d’exposition sur l’échafaud, de dix heures du matin à quatre heures de l’après-midi.

Denis Crepet a été condamné à mort par contumace pour avoir empoisonné sa femme. Le jugement est exposé sur un poteau, de huit heures du matin à huit heures du soir.

Marie Magdeleine David a été condamnée à mort pour avoir assassiné son enfant nouveau-né. Elle aura la tête tranchée par la guillotine.

Pierre Clouzier et son fils, Pierre Alexandre Clouzier, ont été condamnés à mort pour avoir incendié une ferme. Ils seront également guillotinés.

Silvain Hainaut a été condamné à vingt ans de fers pour homicide non consommé. Il sera exposé sur l’échafaud, de huit heures du matin à deux heures de l’après-midi.

Pierre Claude Debeine a été condamné à quatre ans de fer et six heures d’exposition.

Profitons de ces exécutions de sentence pour aborder le sujet de l’ostracisme.

Les bourreaux et leurs familles sont en but à cet ostracisme de toujours. Ils font avec, travaillant en famille pour éviter d’avoir affaire aux autres.

Il est une autre personne qui se trouve en but au même problème : le charpentier désigné par le département, pour procéder à l’entretien, la réparation, la pose et la dépose des instruments de justice.

Le sieur Rouleux Soudry est le charpentier désigné par le département du Loir-et-Cher. Il est informé de chaque exécution, comme l’exécuteur, et doit fournir, immédiatement (la justice n’attend pas), la main d’œuvre nécessaire au montage et démontage, et même au transport.

Seulement il n’y arrive pas. Il perd ses ouvriers qui partent pour ne pas avoir à faire cette tâche qu’ils détestent et, malheureusement, le département étant avare de ses sous, Rouleux ne peut même pas leur proposer une somme suffisante pour les faire changer d’avis. Cela fait pourtant dix ans qu’il est le charpentier préposé à cette tâche.

Il écrit donc au département pour s’en plaindre, à la fois du problème de main d’œuvre, mais également du coût que cela occasionne, des pertes pour son travail ordinaire et du fait que le département continue à pinailler sur ses notes de frais.

Il s’est même renseigné auprès de ses collègues des autres départements, pour savoir combien ils touchaient. Et la réponse est claire : le Loir-et-Cher est radin.

Christine LESCENE
Christine LESCENE

Généalogiste professionnelle depuis 1993 - formatrice en généalogie professionnelle depuis 1995 - Généa bloggeuse depuis 2008

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