La guerre 14-18 et ses morts, nous connaissons. Depuis le temps que le sujet est à l’honneur, nous savons tout (ou presque) sur les Morts pour la France. Parfois, nous parlons de ceux qui restent, les familles, les veuves, les orphelins, mais bien moins souvent que nous parlons des morts.
Pourtant, pour ceux dont la vie doit continuer sans leur époux, père, fils, elle n’est pas un long fleuve tranquille. Elle est plutôt une succession de tracas administratifs à régler pour pouvoir obtenir une pension, une aide, une reconnaissance par l’état de la tragédie vécue, faire appliquer un droit évident.
Pour pouvoir toucher la pension de veuve de guerre, celle-ci doit fournir des papiers, des pièces administratives comme l’acte de décès de leur époux, la mention Mort pour la France, son acte de naissance, l’acte de mariage… et ainsi de suite.
Ces tracasseries administratives sont nécessaires, évidemment, pour éviter les fraudes qui ont toujours existé. Bien souvent, le maire de la commune aide ces femmes dans la détresse, joue les médiateurs avec les administrations, la préfecture, l’armée, et tout rentre dans l’ordre.
Mais lorsque le département où se trouvent les actes originaux est occupé par l’ennemi, zone de guerre ou tout simplement que la commune, la mairie, sont détruites, comment faire pour obtenir ces précieux documents ?
C’est le problème qu’à rencontré Maxellande Lefebvre. Son mari, Pierre Joseph Lefebvre, est Mort pour la France le 10 mars 1916, à Verdun. Tout deux sont du Nord. Maxellande a trouvé refuge à Pontlevoy, dans le Loir-et-Cher, bien loin de sa commune, Esnes, dans le Nord. Il lui est impossible d’obtenir son acte de naissance, ni son acte de mariage, pour compléter son dossier. Elle doit passer devant le juge de paix pour établir une notoriété et c’est ce qu’elle fait, le 24 juin 1918, à Montrichard.
Ses témoins sont trois habitants du Nord : François Defossez, quarante-deux ans, cultivateur à Esnes, Jeanne Ocmant femme Decottignies, lingère de trente-sept ans, domicilié à Roubaix, tous deux réfugiés à Pontlevoy, et Zoé Pipart, vingt-trois ans, domiciliée à Cattenières, dans le nord, et infirmière à Montrichard.
Ils affirment tous les trois bien connaître Maxellande et savoir qu’elle est née le 12 novembre 1886 à Lesdain, et qu’elle s’est mariée le 16 septembre 1907 toujours à Lesdains, ville occupée.
La notoriété devrait suffire à Maxellande, pour obtenir cette pension. Mais aucun lien de parenté ou d’amitié n’est indiqué pour ces témoins. Ils sont juste du Nord, comme elle. Drôles de témoins ? A moins qu’ils ne soient effectivement amis de longue date.
Nous sommes loin des notoriétés où le lien familial est clairement établi. Mais, vous connaissez l’adage : “à la guerre, comme à la guerre”.