Début de vie compliqué pour Paulette

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Le 11 janvier 1917, Louise Marguerite Perdoux, journalière à Tour en Sologne, accouche à la maternité de Blois, à une heure du matin, d’une petite fille, Paulette, née de père inconnu.

Problème, il n’y a aucune trace de la naissance de Paulette à la mairie de Blois. La justice va devoir suppléer à cette absence mais avant cela, mène son enquête.

Paulette est née à la maternité de Blois où les formalités sont normalement réglées comme du papier à musique. La sage-femme inscrit sur la carte d’entrée de la mère la date et l’heure de la naissance, cette carte est transmise à l’employée au bureau des entrées qui remplit le bulletin de déclaration de naissance et le fait signer par le secrétaire. Ce bulletin est transmis à la mairie qui rédige l’acte de naissance.

Mais là, il y a eu un problème. C’est le commissaire Alexandre Lombardi qui mène les interrogatoires, le 28 janvier 1917.

Jules Rothier, 72 ans, secrétaire des hospices est interrogé en premier par le commissaire de police. Il se rappelle effectivement que le 23 janvier, la soeur Rosalie, employée au bureau des entrées à l’hôtel Dieu est venue lui faire signer le bulletin de déclaration de naissance de Paulette. Mais il ignorait que l’enfant était né douze jours plus tôt et il ignore la cause de ce retard. Pour lui, la sage-femme doit prévenir la soeur Rosalie qui s’occupe des déclarations.

Interrogée à son tour, la soeur Rosalie indique que le 18 janvier, l’élève sage-femme de la maternité lui a dit que l’enfant avait été baptisée. Elle l’a marqué au crayon sur un morceau de papier et le 23, n’ayant pas eu le temps de le faire avant, l’a transcrit sur le registre des baptêmes. Elle a voulu alors prendre l’état civil de l’enfant sur le registre des naissances et s’est aperçue qu’il n’y était pas. Elle a immédiatement demandé la carte d’entrée de la mère sur laquelle la sage-femme a inscrit la date de naissance et là, soeur Rosalie a vu que la marque qu’elle met d’habitude pour “déclaré” n’y figure pas. Elle a aussitôt demandé à la mairie si la déclaration de naissance avait été faite mais la réponse a été négative. Elle a donc demandé des explications à la sage-femme qui affirme lui avoir donné la carte, chose dont elle ne se souvient pas. Depuis sept ans que soeur Rosalie occupe ses fonctions, elle n’a jamais oublié de faire les déclarations en temps voulu donc pour elle, la sage-femme ne lui a jamais donné la carte.

C’est le tour de Marie Rose Fourcade, 40 ans, maîtresse sage-femme à l’hôtel dieu qui est interrogée.

Elle se souvient avoir mis au monde Paulette, le 11 janvier à une heure du matin, avoir porté la date sur la carte d’entrée de sa mère et l’avoir fait porter à soeur Rosalie par l’élève sage-femme Pernet. Plusieurs jours après, celle-ci lui a rapporté la carte et lui a fait remarquer que la mention “déclarée” n’y figurait pas. Elle lui a répondu que cela arrivait quelque fois quand soeur Rosalie oubliait de la mettre. Le 17, soeur Rosalie lui a téléphoné pour lui dire que l’on venait chercher Paulette. La nourrice est venue et elle lui a remis l’enfant et une carte pour le sous-inspecteur aux services de santé. Soeur Rosalie aurait dû à cet instant se rendre compte que la déclaration de naissance n’avait pas été faite mais elle n’a demandé la carte d’entrée que le 23. Marie Rose Fourcade n’est pas responsable car c’est soeur Rosalie qui s’occupe des bulletins de déclaration.

Bataille de dames …………. on convoque donc l’élève sage-femme, Octavie Pernet née Planchard, 23 ans. Et son témoignage est conforme à celui de Marie Rose Fourcade.

Renseignements complémentaires pris, le sieur Rothier n’est pas toujours présent à l’hôtel Dieu et a donc pris l’habitude de signer des bulletins de déclaration blancs que la soeur Rosalie remplit ensuite.

Le commissaire conclut donc en renvoyant la faute sur Jules Rothier et la soeur Rosalie et cela s’arrête là. Rien n’est fait pour rectifier ou plutôt créer l’état civil de Paulette.

Il faut attendre décembre 1918, date à laquelle Louise Marguerite Perdoux demande un certificat de naissance pour sa fille, pour que la justice soit saisie. Louise Marguerite a trois enfants sans père et demande l’aide aux familles nombreuses. Pour cela, il faut les actes de naissance de ses enfants et elle découvre que sa fille Paulette n’en a pas.

Le rapport du commissaire est ressorti, on interroge le maire de Tour en Sologne, le maire de Blois et en janvier 1919 seulement, un jugement est rendu pour remplacer l’acte de naissance manquant.

Pourquoi a-t-il fallu attendre deux ans pour cela ?

 

Christine LESCENE
Christine LESCENE

Généalogiste professionnelle depuis 1993 - formatrice en généalogie professionnelle depuis 1995 - Généa bloggeuse depuis 2008

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