Du rififi à Gombergean

Rien ne va plus à Gombergean en ce 30 avril 1780.

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Pierre Fariau, laboureur fermier et procureur fabricien de la paroisse a convoqué une assemblée d’habitants à la fin de la grande messe.

Le notaire, René Côme Marin Desbrosses est là.

Rassemblés au son de la cloche, devant la principale porte d’entrée et de sortie de l’église, se trouvent les fermiers et exploitants de la paroisse et la quasi totalité des habitants. C’est que l’heure est grave et la survie des plus pauvres d’entre eux est mise en péril.

Un arrêt du parlement de Paris a été rendu le 10 mars 1780, entre Joseph Feuillet, laboureur à Putereau, sur la paroisse de Gombergean et Mathurin Tardiveau, et cet arrêt concerne directement tous les habitants de la paroisse, s’il est confirmé.

L’assemblée est en émois et donne à Fariau procuration pour qu’il puisse entamer une procédure auprès du Parlement de Paris afin de soutenir Joseph Feuillet.

Mais de quoi s’agit-il ? Tout simplement de la remise en cause et de l’annulation du droit de parcours de clocher à clocher entre Gombergean et Lancôme.

Et par là-même, le risque de voir disparaître ce droit de parcours de clocher à clocher partout sur le territoire.

Mais qu’est-ce donc ce droit de parcours de clocher à clocher ?

Tout simplement le droit de vaine pâture non pas confiné au terroir de la paroisse mais étendu d’un clocher à l’autre. Un droit immémorial qui permet aux plus pauvres de subsister. Ils peuvent ainsi entretenir une ou deux têtes de bétail sans pour autant posséder de terre ou payer de droit de pacage.

Mathurin Tardiveau, de la paroisse de Lancôme, n’admet pas que Joseph Feuillet, de la paroisse de Gombergean, fasse paître ses bêtes sur son terroir, même s’il s’agit de vaine pâture, et est allé jusqu’au parlement de Paris pour obtenir gain de cause, mettant en péril toute une économie de survie des plus pauvres.

Évidemment, nous sommes à une période où l’agronomie connaît des modifications et des innovations. Les propriétaires terriens aimeraient bien clôturer leurs terres, les exploiter d’une manière différentes. Les lois imposés par la coutume ne leur conviennent plus. Laisser des bêtes qui ne leur appartiennent pas paître sur leurs terres, même vaines pâtures, n’est pas tolérable et l’on voit ce droit de plus en plus contesté partout en France où il existe.

Il va falloir néanmoins attendre la révolution française, la fin des coutumes et la création du code civil pour que cet usage disparaisse.

Je doute que les plus pauvres aient été les gagnants de cette disparition.

 

PS : mais c’est quoi la vaine pâture ? Le droit de faire paître ses bêtes sur les espaces non cultivés, en friche, les bords des routes ou sur les champs après les récoltes. La pâture des pauvres en quelque sorte. Elle est normalement confinée au territoire de la paroisse. Si deux paroisses ont des liens forts, le parcours de clocher à clocher permet la vaine pâture sur les deux territoires à la fois.

PPS : Gombergean dans le Loir et Cher

 

 

Christine LESCENE
Christine LESCENE

Généalogiste professionnelle depuis 1993 - formatrice en généalogie professionnelle depuis 1995 - Généa bloggeuse depuis 2008

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Un commentaire

  1. Merci pour cet article, une coutume inconnue pour moi qui suis d’ un pays de vignes … mais encore chez nous, après les vendanges, c’ est le ban du grappillage qui est publié , même si peu de gens le pratiquent encore : vous avez le droit, même sans en être propriétaire, de ramasser les grappillons oubliés par les vendangeurs dans les vignes et produire ainsi vos quelques litres de vin !

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