Nous voici avec la lettre M et un fait divers dramatique qui a eu lieu au village des Monts, sur la commune de Lunay, en 1881.
Le village des Monts comporte vingt-neuf maisons habitées par vingt-neuf ménages constitués de quatre-vingt-onze personnes. C’est un gros hameau. Trois familles nous intéressent particulièrement. Ils vivent depuis longtemps aux Monts. Leurs enfants y sont nés.
En 1881, Pierre Aubry, cinquante-huit ans, marié avec Marie Françoise Bellande depuis 1852, a six enfants, de vingt-quatre à neuf ans. Mathurin Lhomme, quarante-sept ans, marié avec Catherine Marchenoir, depuis 1857, a six enfants également, de vingt-deux à sept ans. Julien Guellier, quarante-quatre ans, marié à Marie Madeleine Guierche, depuis 1860, a quatre enfants, de vingt à trois ans.
Autant dire que leurs enfants ont grandi ensemble, joué ensemble. C’est ce qui se passe ce jour-là, 18 août 1881.
La petite Nathalie Julie Lhomme, bientôt sept ans, joue devant la maison de Julien Guellier, avec le enfants de celui-ci, dont Léontine, dix ans. Marie Madeleine, leur mère, s’est absentée en confiant à sa fille, la tâche de surveiller le feu. Mais la petite cueille des prunelles près de la maison. Tout naturellement, elle envoie Nathalie s’en occuper à sa place.
Que s’est-il passé dans la maison ? Nathalie était-elle trop jeune pour ce travail ? A-t-elle commis une imprudence ? Alors qu’elle attise le feu, celui-ci prend dans ses vêtements et elle sort en hurlant, dans la rue.
Pierre Aubry passe dans la rue à ce moment-là. La petite, il la connaît bien, elle joue souvent avec ses enfants. Il n’hésite pas un instant et se précipite sur elle, tentant d’éteindre le feu avec ses mains et ses vêtements en la roulant au sol. Mais rien n’y fait. En désespoir de cause, il porte l’enfant jusqu’auprès du tas de fumier où se trouve un peu d’eau. Il réussit enfin à éteindre le feu, mais c’est trop tard. La petite fille a le corps horriblement brûlé. Transportée chez ses parents, elle mourra sept heures plus tard.
Pour sa part, Pierre a les mains gravement brûlées, surtout la main droite. Il ne pourra pas s’en servir pour travailler avant longtemps. Le médecin lui dressera un certificat d’incapacité de travail d’un mois, deux semaines après les faits. C’est une vrai catastrophe pour la famille, car il est le seul à subvenir à leurs besoins.
Mathurin Lhomme et sa famille ne peuvent pas les aider. Ils pleurent leur petite fille, et ce chagrin s’ajoute à des difficultés financières importantes. Il a dû vendre tout ce qu’il possédait et la famille doit quitter le hameau où elle a toujours vécu, pour s’installer à Asnière, sur la même commune.
Vues les difficultés rencontrées par Pierre et les siens, tout le monde se mobilise pour lui obtenir une gratification, un secours dans l’attente de sa guérison, pour sa bonne action aux conséquences si désastreuses pour lui : le maire, les gendarmes, le médecin qui certifie de ses blessures, les habitants du hameau, adressent une demande au préfet. A-t-elle été couronnée de succès ? Je l’ignore, les documents ne le disent pas.
Pierre n’a pas pensé aux conséquence. Il a agi comme n’importe quel père, car cela aurait pu être sa petite fille, à la place de la petite Nathalie.
Décidément que de malheurs liés au feu… C’était vraiment un danger de chaque instant.
c’était aussi un élément de vie paradoxalement : se chauffer, cuire les aliments, s’éclairer. Le revers de la médaille était le danger.